vendredi 22 juin 2012

Les vagues se jetaient dans la barque Mc 4, 37.

Je relis en ce moment l'évangile de Marc. Au chapitre 4, il y a les malades qui se jettent sur Jésus pour le toucher, il y a les esprits mauvais qui se jettent à ses genoux et enfin il y a les vagues qui se jettent dans la barque pour la remplir (et donc pour la faire couler avec le "dormeur" qu'elle transporte).

Je pense que c'est ce verset là qui a fait remonter un souvenir, qui pour moi n'est pas un rêve mais une réalité. Peut être que Freud appellerait cela un souvenir écran, mais je n'ai pas envie de le traiter comme cela. L'expérience que j'ai vécue, c'est bien celle des vagues qui se jetaient sur moi, pour me faire mourir en me faisant perdre le souffle.

J'avais dans les 7 ans, c'était en hiver. J'habitais dans le midi et avec ma mère et nous avions l'habitude de faire des promenades. Nous étions arrivées au bord d'une plage, mais nous étions sur sur la route qui la dominait, pas sur la plage elle-même. La mer était forte. Je suppose que ma mère avait dû rencontrer quelqu'un car je me suis trouvée seule au bord de l'eau. Il y avait des digues en cailloux  qui s'enfonçaient dans l'eau sur une dizaine ou une quinzaine de mètres.

J'emploie le mot de digue faute de mieux. Il ne s'agit pas de protéger la terre de la mer, mais d'une sorte de construction qui part de la plage en s'appuyant certainement sur des rochers existants, un remblai pourrait on dire, et qui s'enfonce dans la mer, comme pour faire une série de criques les unes à côté des autres. Je n'ai trouvé que cette image pour faire comprendre ce dont je veux parler, mais c'est bien le mot de remblai qui s'impose pour moi car il s'agissait de quelque chose qui était là pour un temps, le temps de l'hiver certainement, et qui vraisemblablement allait être démantelé par la mer au fil du temps.

Je me suis avancée sur cet espèce de chemin de cailloux certainement pour mieux voir la mer, mieux voir les "moutons" car c'est ainsi que l'on appelait l'écume des vagues quand la mer était forte.



Et d'un seul coup, le bout de la digue s'est effondré sous moi.

Je me vois tombée sur les genoux, les cailloux sous moi, la tête au niveau de l'eau, et les vagues qui déferlent sur moi. Mes cheveux (j'avais des nattes à l'époque) se défont, et les vagues passent sur ma tête pour me faire basculer au fond de l'eau. Chaque fois que j'arrive à la relever pour respirer, une nouvelle vague arrive et me replonge sous l'eau. Le poids des cheveux mouillé est tel que je ne peux rien faire. Je sais que je fais des efforts mais que je suis incapable de crier, incapable de penser. Je veux dire par là que je j'imagine pas que je puisse mourir, simplement j'essaye de sortir la tête de l'eau, encore et encore. Et à chaque fois c'est de plus en plus difficile.

A ce moment là, il y a quelqu'un, je pense que c'est un "monsieur" comme on disait à l'époque, qui me prend sous le ventre, un peu comme on prendrait un petit chat, qui ne dit pas un mot et qui me ramène sur la plage. Il n'y a pas de mots, simplement je suis en sécurité. Mes vêtements sont secs, mes cheveux aussi. Ma mère qui arrive à ce moment là ne remarque rien et moi, je me garde bien de dire quoique ce soit, parce que je crois qu'elle m'aurait en premier demandé qui était ce monsieur et que bien entendu je n'en n'avais pas la moindre idée mais que je savais qu'il ne faut pas "faire confiance" à quelqu'un qu'on ne connaît pas (même si dans le cas présent il venait de me sauver la vie, mais comme mes vêtements étaient secs, elle ne m'aurait pas cru).

Et peu importe si c'est vrai ou pas, mais ce que j'ai vécu ce jour d'hiver, je l'ai vécu. Je ne sais pas qui était ce monsieur qui m'a littéralement arrachée aux flots qui se jetaient sur moi, mais il m'a sauvée. En fait peu importe qui il était, ce que je sais c'est que j'ai fait l'expérience d'une force qui m'arrachait à une autre force et qui de plus ne me demandait rien (pas besoin de dire merci) parce qu'il n'était plus là. Il a apparu au bon moment et disparu.

Pourquoi avoir refoulé cet événement? Pourquoi a t il ressurgi avec ce verbe "se jeter sur"mot qui est peut être propre à la bible de Jérusalem? Peut être parce que maintenant ce monsieur sans visage, dont je sentais la force et la détermination peut être nommé et remercié.

Mais comme le dit un chroniqueur de France info, vous n'êtes pas obligés ce me croire...

1 commentaire:

AlainX a dit…

La TOB comme la Bible Chouraki disent la même chose : "se jettent".

Ce n'est pas tant le "support" qui importe me semble-t-il, mais l'expérience, en ce qu'elle a pu être ressentie, de cette force qui t'arrachait à une autre.

Il me semble que dans une vie, cela a quelque chose de fondateur.

D'une certaine manière : « hors de l'expérientiel, point de salut ! »