mercredi 29 août 2018

Marc 6, 17-29: La mort de Jean le Précurseur.

Petite Introduction. 

J'essaie, au jour le jour, de travailler les textes des évangiles proposés par la liturgie. Peut-être que je passerai aux épîtres, sait-on jamais. 

Je dirai que ce travail, qui consiste à reprendre les versets ou des groupes de versets, peut paraître un peu scolaire, mais il a l'avantage de ne pas se centrer sur un verset spécifique (ce que font la plupart des commentaires). Parfois un mot ou un verset prend sens pour moi, et c'est certainement cela que j'ai envie de transmettre. 

J'aime bien surligner des mots, des verbes, des adverbes. Pour moi, ils sont importants, ils m'aident à m'approprier le texte. Parfois ils renvoient à autre chose, à un autre texte où ils se trouvent. Cela est une aide pour moi. 

Mon idée est donc, pour le moment, de reprendre ce blog qui est en sommeil. Il s'appelle "intime" et porte bien son nom, parce que c'est un travail au jour le jour, pas forcément tous les jours, où si je découvre des choses inconnues, je me dis que d'autres peuvent aussi me découvrir, ce qui n'est pas toujours si simple. 

Alors disons que je me jette un peu à l'eau, avec l'évangile de la décollation de St Jean Baptiste. C'est un évangile que je n'aime pas, il revient trop souvent, et la place de cet homme, je ne la comprends pas trop. Il est le plus grand des prophètes (bouche de Dieu qui rappelle ce qui est mal plus que ce qui est bien), mais le plus petit dans le Royaume... 

Autre chose encore. Après avoir travaillé ce texte, je pensais à ce pauvre type, ce pauvre garde qui en pleine nuit de fête, doit mettre à mort (peut-être égorger tout bêtement parce que c'est ce qu'il y a de plus facile) un homme emprisonné injustement, et apporter sa tête sur un plat à cette gourgandine qui est la fille de cette p... de reine. Et peut-être qu'un jour je pourrai écrire un texte à la première personne. 

Marc 6, 17-29.  

Je n'aime pas les fêtes de Jean le Baptiste, je ne comprends pas bien l'importance qu'on lui attache. Mais c'est comme ça. Et normalement cet épisode est comme un sandwich dans cet évangile. et effectivement on trouve l'envoi de disciples en mission, du coup Hérode qui se pose des questions, et le retour des disciples (avec la multiplication des pains).

17 Car c’était lui, Hérode, qui avait donné l’ordre d’arrêter Jean et de l'enchaîner dans la prison, à cause d’Hérodiade, la femme de son frère Philippe, que lui-même avait prise pour épouse.

Marc reprend l'histoire de Jean-Baptiste, parce qu'Hérode se pose des questions au sujet de Jésus, et qu'il se dit que Jésus c'est Jean Baptiste revenu à la vie, ce qui est une manière finalement de se dédouaner: oui je l'ai fait décapiter, mais je ne le voulais pas, et il est vivant, donc il n'est pas mort. Un peu infantile comme raisonnement. 

Mais je n'avais jamais lu (ou trop vite), le mot enchaîné. Cela renvoie surement aussi à Isaïe, et à la phrase que Jésus cite quand les disciples de Jean viennent le voir pour savoir s'il est celui qui doit venir. Sauf que Jésus ne libère pas son cousin. Et être enchaîné c'est un peu avoir un statut d'animal. Pauvre Jean, habitué à vivre au bord du Jourdain.

18 En effet, Jean lui disait : « Tu n’as pas le droit de prendre la femme de ton frère. »
19 Hérodiade en voulait donc à Jean, et elle cherchait à le faire mourir. Mais elle n’y arrivait pas
20 parce que Hérode avait peur de Jean : il savait que c’était un homme juste et saint, et il le protégeait ; quand il l’avait entendu, il était très embarrassé ; cependant il l’écoutait avec plaisir.


 On a là un résumé. Jean montre à Hérode qu'il est un pécheur. Hérodiade fonctionne un peu comme Jézabel ou Athalie dans l'ancien testament. Cet homme qui lui tient tête (comme Elie) il faut s'en débarrasser, mais contrairement à Jézabel elle n'a pas beaucoup de pouvoir. Elle doit donc subir et trouver un biais pour arriver à ses fins. 

Ce que Marc décrit d'Hérode est un peu bizarre. Il a peur de Jean, (comme si Jean pouvait parce qu'il est un homme juste et saint, faire tomber sur lui le feu de Dieu). On dirait qu'une partie de lui sait qu'il fait mal, mais que ce que Jean dit (et on ne sait pas ce qu'il dit) l'intéresse. 

21 Or, une occasion favorable se présenta quand, le jour de son anniversaire, Hérode fit un dîner pour ses dignitaires, pour les chefs de l’armée et pour les notables de la Galilée.
22 La fille d'Hérodiade fit son entrée et dansa. Elle plut à Hérode et à ses convives. Le roi dit à la jeune fille : « Demande-moi ce que tu veux, et je te le donnerai. »
23 Et il lui fit ce serment : « Tout ce que tu me demanderas, je te le donnerai, même si c’est la moitié de mon royaume. »

On dirait qu'Hérodiade est à l'affut d'une occasion. Elle doit bien connaître le roi, et elle sait certainement qu'une fois bien imbibé, il se laissera aller et fera une promesse d'ivrogne, dont il ne pourra pas se dédire. Et c'est ce qui se passe. Mais promettre la moitié d'un royaume qui ne vous appartient pas vraiment (les Romains sont derrière) c'est un peu une promesse de gascon.

24 Elle sortit alors pour dire à sa mère : « Qu’est-ce que je vais demander ? » Hérodiade répondit : « La tête de Jean, celui qui baptise. »

On retrouve peut-être le plan.. Mais normalement elle n'aurait pas dû sortir.. Enfin à mon avis. Mais cela montre qu'elle n'est pas coupable, mais que c'est sa mère qui l'est. 

25 Aussitôt la jeune fille s’empressa de retourner auprès du roi, et lui fit cette demande : « Je veux que, tout de suite, tu me donnes sur un plat la tête de Jean le Baptiste. »
26 Le roi fut vivement contrarié ; mais à cause du serment et des convives, il ne voulut pas lui opposer un refus.

Il y a "aussitôt" et "tout de suite". Il faut agir vite. Le roi est coincé, comme Jephté dans le livre de Juges. Tout roi qu'il est, il ne peut pas s'opposer. 

27 Aussitôt il envoya un garde avec l’ordre d’apporter la tête de Jean. Le garde s’en alla décapiter Jean dans la prison.
28 Il apporta la tête sur un plat, la donna à la jeune fille, et la jeune fille la donna à sa mère.

On dirait que la vue de la tête est épargnée aux convives. Je plains le garde, qui espérait passer une bonne soirée, et qui avait peut-être fêté aussi l'anniversaire du roi avec ses collègues. J'imagine (et c'est affreux) qu'il égorge Jean (qui est alors figure de ce qui arrivera à l'agneau de l'Apocalypse qui est figure de Jésus), et qu'ensuite la tête est coupée. La mort de Jean n'est pas celle de Paul dans une prison romaine. Et la tête passe de la fille à la mère, sans qu'on sache ce que cette dernière en fait, sauf que c'est horrible.

29 Ayant appris cela, les disciples de Jean vinrent prendre son corps et le déposèrent dans une tombe.

Cela fait un peu penser à ce qui va se passer pour Jésus, Le disciple qu'est Joseph d'Arimathie va réclamer le corps, sauf que là le corps est abimé mais complet, pour le mettre dans une tombe.

On a deux mises à mort politiques finalement. Celle de Jean, liée au pouvoir d'un roi mis en place par les Romains, pour faire taire quelqu'un qui dénonce le mal, qui ne fait pas deux poids et deux mesures: ce qui est mal est mal, et le roi n'est pas au-dessus des lois juives de la Tora. Celle de Pilate, qui cède aussi au chantage, qui ne peut pas revenir en arrière; qui par contre ne se sent pas concerné, mais qui est lâche (comme Hérode). Il fait mettre Jésus à mort, parce que Jésus comme Jean attaque le pouvoir religieux.

Intéressant de comparer les deux morts. Il y a quelque chose de prophétique dans la mort du Baptiste. Là, on peut parler de précurseur, qui dévoile ou manifeste que le mal est à l'œuvre pour fermer la bouche à la Parole et au Verbe.