mercredi 19 octobre 2011

Peut-on s'abandonner quand on a été abandonné?

Un billet du mois dernier...  Incomplet, la suite un jour ou l'autre en fonction des événements.

Hier, pendant une séance de shiatsu, j'ai pu ressentir en moi un abandon total de mon corps, en particulier de ma tête dans les mains de la thérapeute. Ceci avait été précédé de deux moments l'un où je me suis en quelque sorte centrée sur la musique avec le désir d'écouter vraiment, d'entendre toutes les notes, tous les instruments pour me laisser "prendre" par ces sonorités et un autre  moment où je suis comme envahie par le plaisir de laisser l'air ambiant entrer en moi, ce qui me permet de ressentir la fraîcheur de l'air mais aussi ce subtil qui est en lui. Je pense que ces deux temps ont permis cette expérience d'abandon qui me renvoie à ce que je vis parfois dans l'eau quand je fais la planche là où il y a assez de profondeur et où je me laisse complètement porter par la mer (sans jeu de mot).

Mais pour pouvoir s'abandonner ainsi, abandonner tout contrôle il est indispensable de faire confiance à l'autre (ici la thérapeute qui je le sais veut du bon et du bien pour moi) mais aussi de savoir que si quoique ce se soit se passe, il y a en moi la possibilité de bouger, ce qui veut dire faire aussi confiance à mon propre corps. Si je peux me laisser aller dans l'eau c'est que je nage suffisamment bien pour pouvoir réagir si jamais une vague malencontreuse venait me chatouiller les naseaux..

L'image traditionnelle de la confiance est celle du bébé qui vient de prendre son content de nourriture, qui a même peiné pour cela et qui se laisse totalement aller dans les bras de sa mère, certain qu'il est qu'elle ne va pas le laisser tomber. Cette représentation là elle est belle, mais quand on a vécu (ce que tout individu vit à son corps défendant) des abandons s'abandonner devient très difficile. Il faut comme je viens de le dire d'une part faire confiance à l'autre, mais aussi se faire confiance à soi.

Pour s'abandonner il faut peut être que les peurs liées aux abandons soient parties, or elles font partie de notre mémoire. S'abandonner c'est ne plus bouger, c'est être volontairement paralysé (volontairement). Or la paralysie, la dépendance est bien quelque chose qui nous fait peur. Etre abandonné quand on ne peut pas faire ce qu'il faut pour se "sauver"(ce qui est souvent le cas de l'enfance) renvoie à la mort.

Peut-être que dans les synoptiques si une des premières guérisons rapportées est celle du paralytique c'est que quelque soit l'origine de la paralysie (physique ou psychique car d'une certaine manière le péché quand il entre en nous nous aveugle, nous fait perdre l'acuité de nos sens et nous paralyse comme une toile d'araignée) perdre son autonomie est quelque chose de terrorisant.


Cette paralysie, toutes les personnes qui ont vécu des abus sexuels dans leur enfance, ou même des viols à un moment de leur vie, la connaissent. C'est l'impossibilité de crier, de hurler, d'appeler au secours, c'est l'impossibilité de bouger, c'est la perte totale de la maîtrise, c'est être livré au bon (ou mauvais) plaisir de l'autre.



Je pense que sur la croix, Jésus a fait cette expérience de ne rien pouvoir faire. Je pense parfois à ce que doit être que de ne pas pouvoir bouger lorsqu'une ou des mouches viennent sur vous... Et si Jésus dans les différents psaumes a choisi le psaume 21, c'est peut être parce que vivre cet abandon, cette solitude mais aussi cette paralysie a dû être pour lui comme pour nous une source de terreur intense. On a beau dire que certes ce psaume se termine par de la confiance (je chanterai ton nom dans la grande assemblée) l'expérience de l'abandon fait peut-être de Jésus un frère (en humanité comme on le dit si souvent), une victime et aussi un créateur, qui comme je l'ai lu récemment "l'abandon d'une représentation d'un dieu qui abandonne (le dieu vengeur et colérique ).






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